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Bâtiments.Trois défauts fréquents révélés par les vidéos

Reportage 1/3. En multipliant les vidéos en élevage, des défauts récurrents apparaissent. Ce premier volet concerne le logement et l’abreuvement des vaches. Tour d’horizon de ce qui pèche, et des solutions.

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L’observation de la répartition des vaches dans le bâtiment offre de multiples informations sur ses caractéristiques. Dans l’idéal, elle doit être homogène. Chaque vache doit vivre à son rythme en se déplaçant comme elle le souhaite vers l’auge, le couchage, l’aire d’exercice ou les abreuvoirs. Si l’on constate des attroupements à certains points alors que d’autres sont sous-fréquentés, il faut en chercher la cause. Car ces regroupements induisent forcément une compétition défavorable au bien-être des vaches et à leur production.

Les vaches dominantes « s’incrustent » aux meilleures places.

Une zone peut être préférée à une autre en raison d’une meilleure ventilation en été, par exemple. Les vaches se regroupent alors autour d’une entrée d’air, certaines en profitent plus que les autres. Parce qu’elles ont un comportement grégaire, elles s’attroupent, même si les dernières arrivées ne bénéficient pas vraiment de l’avantage de l’ouverture. Ce comportement empêche une circulation normale. Les vaches dominantes s’incrustent à la meilleure place et restent défendre ce territoire au lieu d’aller manger ou se reposer.

Souvent, quand la chaleur dérange les vaches, elles se rassemblent dans des endroits différents en fonction de la position du soleil. Les regroupements à proximité des points d’eau sont également fréquents. Ils traduisent un accès à l’eau insuffisant et on les observe bien évidemment surtout durant les périodes chaudes. D’une manière générale, c’est la rareté d’un élément qui incite certaines vaches à l’accaparer, au détriment des autres et du confort de toutes. Ce peut être un Dac, ou une brosse. On voit parfois des regroupements induits par un racleur trop haut ou trop rapide. Les vaches parviennent difficilement à passer au-dessus et se retrouvent poussées à une extrémité. Ce phénomène est accentué lorsque les espaces de dégagement sont insuffisants. Il faut prévoir, toutes les quinze logettes, un passage d’au moins deux mètres de large, suffisant pour que deux vaches puissent s’y croiser.

Attention à maintenir cette possibilité de croisement quand on y place un abreuvoir. « Nous avons réalisé environ 200 films en élevage depuis cinq ans. Les rassemblements anormaux, pour différentes causes, sont observés sur un tiers d’entre eux : c’est beaucoup », constate Yannick Saillard, vétérinaire chez Innoval. Preuve que la circulation des animaux peut être améliorée dans bien des cas. L’impact sur les animaux est variable, mais d’une manière générale, les vaches risquent de ne pas manger et boire suffisamment, ce qui peut pénaliser la production. Le piétinement peut aussi avoir des consé­quences sur la santé des pieds. Quand ces mauvaises répartitions sont observées, on parvient souvent à en identifier la cause. Mais il n’est pas toujours facile d’y remédier. Il est généralement possible d’ajouter un abreuvoir, ou de réduire la vitesse du racleur. Améliorer la ventilation ou agrandir les espaces de circulation se révèle plus compliqué. Les solutions sont à trouver au cas par cas.

Les vaches ne se couchent pas dans les logettes.

Le deuxième défaut fréquemment observé concerne le couchage. Les vidéos montrent des vaches qui restent debout dans les logettes, qui en visitent une, puis une autre. Quand elles finissent par se coucher, elles bougent sans arrêt. Ces comportements se repèrent difficilement au quotidien car il faut suivre les vaches individuellement pendant un certain temps. Normalement, une vache se couche en moins de deux minutes puis se relève au bout d’une heure pour se retourner. Elle se repose encore une heure avant d’aller manger ou boire. Ces réticences au coucher traduisent un manque de confort ou un mauvais réglage des logettes. Elles révèlent aussi parfois un problème de ventilation. C’est le cas, par exemple, en été, quand un dôme éclairant provoque un effet de serre localisé.

Sur des logettes en béton, il est difficile de maintenir une bonne répartition de la paille, ce qui génère de l’inconfort. De même, en présence d’un sol non plan, les vaches ont du mal à s’installer confortablement. Les tapis non paillés entraînent aussi souvent un manque de confort, ainsi que certains matelas. En revanche, dans les logettes creuses, on voit les vaches s’étaler, signe qu’elles s’y trouvent bien. Lorsqu’une proportion importante de vaches reste perchée dans la logette avec deux pieds à l’extérieur, c’est bien souvent le réglage qui est à mettre en cause. La barre du cou est mal positionnée. Trop basse ou trop reculée, elle empêche la vache d’entrer complètement dans la logette et de s’y coucher.

Parfois, c’est l’espace disponible à l’avant qui manque. La vache a besoin d’au moins un mètre de dégagement pour se coucher ou se relever. Si elle se trouve face à un mur ou à un stockage de paille, elle n’y parvient pas. On la voit alors rester longtemps debout, finir par se coucher et ne plus bouger pendant bien plus d’une heure. Dans ce cas, elle ne se déplace plus assez souvent pour aller boire ou manger.

Les vidéos montrent parfois des vaches qui se positionnent mal dans les logettes. Elles s’installent en travers, ou très à l’avant ou à l’arrière, avec parfois les membres postérieurs à l’extérieur. Certes, dans ce dernier cas, il n’y a pas de bouses dans la logette. Mais quand la vache est trop avancée, elle bouse à l’intérieur et ce manque de propreté augmente le risque de mammites. Ces positions inconfortables doivent être évitées. Elles résultent souvent d’un arrêtoir mal positionné, voire absent. Il est possible aussi que les logettes soient trop larges, ou équipées d’un bat-flanc trop haut. Parfois, les logettes­ sont trop grandes pour les primipares. Quand on voit que les vaches se couchent mal, il est nécessaire d’observer aussi l’état de leurs membres. La présence de tarsites ou d’escarres confirme le diagnostic d’inconfort. « Une vache qui reste longtemps debout avec deux pattes à l’extérieur de la logette fait supporter une part importante de son poids à ses membres inférieurs. On risque alors des lésions podales d’origine mécanique », précise Yannick Saillard. D’ailleurs, ce sont parfois des boiteries de ce type qui alertent sur le manque de confort des logettes.

En aire paillée, les problèmes liés à l’inconfort du couchage sont plus rares. Mais il arrive aussi que l’on constate une répartition hétérogène des vaches dans ces espaces. Elles cherchent à éviter les zones souillées, proches de lieux de passage, ou encore mal ventilées. Une vache a besoin d’être tranquille quand elle se repose. On constate parfois des difficultés d’accès à l’aire paillée. Une marche trop haute, par exemple, conduit à réduire la fréquentation­. Elle ne doit pas dépasser 30 cm. Sinon, les vaches risquent de glisser et de se blesser. Comme pour les logettes, les défauts de l’aire paillée peuvent engendrer des boiteries, avoir un impact négatif sur la production mais aussi sur la croissance pour les génisses. Par ailleurs, les vidéos montrent parfois des erreurs de conduite, par exemple des vaches qui restent trop longtemps bloquées au cornadis. Cela réduit le temps disponible pour d’autres activités. Il est souvent simple d’y remédier.

Les abreuvoirs manquent ou sont mal répartis.

Autre point pour lequel les vidéos révèlent souvent des failles : l’abreuvement. On peut constater des attroupements autour des points d’eau, certaines attendent leur tour. Les vaches ont besoin de boire après la traite et après avoir mangé, donc toutes aux mêmes moments. Ces goulots d’étranglement se rencontrent moins dans les élevages où la traite est robotisée.

On préconise 7 à 10 cm linéaires d’abreuvoir par vache, afin que 10 % du troupeau puisse s’abreuver simultanément. Il est important aussi que les abreuvoirs soient bien disposés et suffisamment nombreux pour qu’aucune n’ait plus de 5 m à parcourir pour aller boire. L’objectif est un point d’eau pour 25 vaches. Or, 80 % des élevages ne disposent pas de 7 cm d’abreuvoir par vache. Les primipares sont les premières victimes de la compétition qui en résulte. On peut constater des productions hétérogènes dans ce lot, signe que certaines s’en sortent mieux que d’autres.

Lorsque la vidéo suggère des difficultés d’abreuvement, une visite de l’élevage permet d’identifier la cause. « À cette occasion­, on remarque très souvent que les abreuvoirs­ ne sont pas propres », souligne Yannick Saillard. Leur nettoyage doit être prévu dans le planning de travail, au minimum une fois par semaine. Il est facile d’accrocher une brosse et une éponge à proximité de chaque point d’eau pour réduire le temps de nettoyage et intervenir aisément quand on constate, en passant, que c’est nécessaire. De plus, la hauteur de l’abreuvoir résulte d’un compromis entre la facilité d’accès pour la vache et l’absence de risque de souillures par les bouses. Il faut viser un bord haut à 80-90 cm.

Certaines vidéos montrent des vaches qui viennent boire souvent mais ne restent pas longtemps. Après vérification en élevage, on relève souvent un débit insuffisant. Une vache boit 15-20 litres d’eau par minute. Les conséquences d’un manque d’eau sont exacerbées en cas de stress thermique. Mais la plupart des éleveurs cherchent davantage à maîtriser la température qu’à assurer un abreuvement suffisant.

Pascale Le Cann

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